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Irimi, entrée dans l’Aïki

Dans les années 30, époque de l’Aïki-Budo et du Noma Dojo, Maître Ueshiba enseignait que l’Aïkido c’était 90% Irimi et Atemi.

Irimi et atemi

Irimi et Atemi

L’Atemi mérite et fera l’objet d’une étude à part entière.

Classiquement, on comprend et on interprète Irimi comme une entrée dans la sphère et le mouvement d’Uke par opposition et complémentarité avec Tenkan qui est mouvement tournant épousant l’attaque que l’on peut considérer comme une entrée d’Uke!

 

Le principe Irimi est si fondamental qu’une projection en porte le nom: Irimi-nage.

Deux questions se posent:
Pourquoi Tohei Koichi, grand pédagogue, a t-il nommé cette technique « Kokyu-nage » sachant que le principe  Kokyu est aussi fondamental et se retrouve dans toutes les techniques?
Pourquoi n’existe t-il pas une projection portant le nom de « Tenkan-nage » ce qui serait logique quand on constate le nombre de mouvements basés sur l’esquive sans entrée exécutés par nombre d’experts notamment en randori?
En apparence, irimi est réalisé par une avancée du pied avant suivi:
-soit d’une action linéaire dite positive ou Omote,
-soit d’une action tournante ou tourbillonnante dite négative ou Ura.
Notons que l’évolution moderne tend à concevoir Irimi comme le mouvement de vague, c’est-à-dire la sortie de la projection, ce qui peut prêter à confusion!

 

Affiche du séminaire 2012

Affiche du séminaire 2012

Essayons d’aller plus loin (l’Aïkido est comme un iceberg: 10% de visible, 90% d’invisible).

L’homme a une structure tripartite (physiquepsychique et spirituelle). Ainsi, Irimi permet l’entrée dans cette triple nature d’Uke avec une capture des forces corporelles agressives et une capture des forces mentales. Le but est de dissoudre l’opposition en appliquant le principe de non-violence cher à l’Aïkido et de réaliser le principe « Aïki« .

Sur le plan physique:

Le mouvement du corps (Taï-sabaki) comprend:
-le mouvement du ou des pieds (Ashi-sabaki)
-le mouvement des hanches (Koshi-sabaki)
-le mouvement  d’une ou des deux mains: (Te-sabaki)
Le Taï-sabaki comprend tout ou partie de ses trois composants et l’on doit considérer comme tel un simple mouvement de pied sans déplacement des hanches et des mains, de même un mouvement de main isolée ou un mouvement de hanche isolée.
En fait toutes les combinaisons sont envisageables!

Par analogie, on aura donc trois possibilités d’Irimi:
-au niveau du pied (mouvement bien connu …en tauromachie!)
-au niveau des hanches,
-au niveau de la main,
avec là encore toutes les combinaisons possibles, la plus pratiquée étant l’association des trois.
L’entrée avec attaque du pied avant dans la garde d’Uke entraine non seulement un bon timing permettant l’évitement de l’attaque (cf l’Aïkido et l’Iaïdo Toho de Nishio Shoji), mais aussi un Aïkido dynamique avec une dimension verticale 3D, une « mise en vibration du Hara » qui a pour effet d’alléger Uke (l’Aïkido de Tohei Koichi est très caractéristique de cet « effet sautillant »; avant lui, Shioda Gozo et …O Sensei). C’est un Aïkido que nous qualifierons de rythmique et musical.

Sur le plan mental:

Irimi permet de prendre l’offensive ce qui peut paraître paradoxal en apparence dans un art de défense. Offensive ne veut pas dire attaque mais aussi initiative. Il faut comprendre la relation Yin-Yang au delà d’une simple complémentarité pousser-tourner.
Selon l’enseignement de Kichi Ogen repris par Abe Tadashi et rapporté par Pierre Warcollier (cf.L’esprit de l’Aïkido, 1ère partie) , si l’on donne la valeur 9 à l’attaque et la valeur 1 à l’action de défense, soit l’action Irimi, le total fait 10 soit une action Yin très caractéristique de l’Aïkido des années 50 chez Maître Ueshiba. Ce n’est donc plus une relation Yin-Yang au premier degré mais une relation grand Yang-petit Yang pour créer du Yin (cf. Isha Schwaller de Lubicz)!
Si l’on veut aller plus loin, le mental qui se traduira par le regard, la main et l’attitude générale avec l’ouverture de nos Centres notamment le Hara, donnera l’autorisation de l’attaque, voire pourra annihiler l’intention.

L’entrée dans la sphère et le mouvement d’Uke permet de capturer son centre et son axe. Mais le Te-sabaki permet d’aller plus loin en créant un lien autorisant la capture du Ki de l’attaquant. Soulignons de suite que ce lien est fondamental et est une condition sine qua none pour réaliser une technique complète. En disant cela, nous ne nous limitons pas à l’aspect seulement technique et self-défense de l’art martial.

Sur le plan spirituel:

N’oublions pas la partie la plus fondamentale de notre constitution, c’est-à-dire l’Esprit que le monde moderne occulte et confond allègrement avec le mental. Si l’Aïkido ne permettait pas un accès (Tao, Do) au monde spirituel (le non-manifesté), ce ne serait qu’un Jitsu, sophistiqué certes mais seulement une technique de combat.
La conscience de la « main Irimi » liée au Coeur permet l’entrée dans le monde spirituel, au delà du mental, au delà de l’espace-temps caractéristique du Ma-aï, au delà du dualisme des égo attaquant-attaqué (relation « je-tu »  ou dit autrement, « ni toi, ni moi »).

Le principe Irimi, en particulier la « main Irimi », est la porte d’entrée vers l’Aïki que nous ne devons pas limiter au principe d’union des énergies, mais comme le principe d’unité de toutes choses, ce qu’enseignait O Sensei sous le vocable de « Nen« .

                                   JMT

 
 

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