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par Patrice Le Pihive

Cette petite réflexion »personnelle» suite au propos de Jean-Marie affirmant que « nous n’imaginons pas tout ce que l’AIKIDO nous donne!»

S’il est facile de voir et de ressentir les transformations de nos partenaires, il est beaucoup plus difficile d’estimer ses propres évolutions, la sanction d’un nouveau Dan venant souvent comme un déclencheur de nouvelles potentialités pas encore totalement assumées par le pratiquant et que cette nomination va autoriser à se révéler.

Quelle est donc cette alchimie silencieuse qui œuvre dans le creuset du tatami ?

LES SPIRALES DE L’AIKIDO

Il semble que les transformations à la fois physiques, psychiques, émotionnelles, énergétiques, voire spirituelles que permet la pratique de l’Art martial qu’est l’Aïkido évoluent en spirales, qui tout en repassant sans fin par les mêmes points techniques, en élèvent progressivement les principes dans une spirale tendue vers un seul point.
Dans ces méandres, l’expérience de Maîtres ayant déjà parcouru le chemin et capables d’en baliser pour chacun les contours et le sens est infiniment précieuse et suscite respect et reconnaissance.

La spirale apparemment la plus simple, celle du Tai Sabaki caractérise notre pratique en transformant et en organisant les directions et les intensités de nos forces avec celles du partenaire attaquant.
La mise en mouvement physique de chacun des pratiquants est intense, elle sollicite fortement tous les systèmes, musculaire, articulaire, circulatoire, nerveux, cardiaque, respiratoire pour un « décrassage   en profondeur » du corps, un rodage et un entretien de la mobilité dans tous les plans extrêmement bénéfiques, comme en témoigne après la saine fatigue de la fin de séance le dynamisme retrouvé du lendemain matin !

Cela implique pour l’adepte de donner de façon régulière de son temps de vie à la pratique, ce qui luis sera facile s’il y retrouve à chaque fois une Joie libératrice de ses tensions et de ses préoccupations quotidiennes.

La conscience du corps physique, de sa posture, de son équilibre et l’amélioration progressive de la coordination motrice, haut-bas, droite-gauche, avant-arrière, dissociation des ceintures scapulaires et pelviennes, posture vertébrale érigée, équilibre du bassin, tension ou relaxation segments par segment, giration en équilibre, ouverture placement du regard… sont travaillés encore et encore dans des phases successives d’euphorie en cas d’un succès malheureusement souvent éphémère, très vite suivie de découragement devant les échecs trop vite retrouvés.
Ce travail d’accordage se fait en Aïkido grâce au lien amical et respectueux avec un partenaire, dans un échange permanent de techniques codifiées et alternées, permettant un ressenti réciproque et interdépendant dans un espace-temps sans cesse renouvelé et dont la prise de conscience progressive est un des éléments fondamentaux de la pratique.
La volonté délibérée de refuser l’agressivité, en repoussant la peur de soi et de l’autre, y compris dans une confrontation qui aurait pour but de nier notre existence en nous détruisant, caractérise la pratique de l’Aïkido  et son esprit à travers des règles d’étiquette et de comportement qui nous incitent au respect de soi et des autres, en fluidifiant une gestuelle martiale qui doit être efficace sans porter préjudice ni enclencher une spirale négative de destruction stérile.

Au contraire le moment libérateur de la chute sera vécu comme une «purification» des forces négatives d’Uke.

Patrice Le Pihive

Cette pacification mentale, en autorisant une certaine douceur pour soi-même, diminue la violence sous-jacente dans l’ensemble des relations inter humaines et apprenant à mieux comprendre pour moins s’opposer ou s’imposer.
Apprendre à agir plutôt que réagir !

VERS UNE SPIRALE ENERGETIQUE ?
En observant et en ressentant la pratique d’un Maître, on perçoit la possibilité d’un Aïkido plus «énergétique» que physique.
La littérature abonde sur la description des corps d’énergie et de leurs différents transformateurs subtils.
Parfois multipliés ou regroupés, on décrit classiquement 7 centres importants.
En suivant la description indienne on trouve :
Mulhadhara, connexion à la TERRE région du périnée
Swadhisthana, connexion à l’EAU sacrum pubis
Manipura, connexion au FEU région du nombril lombaire 3
Anhata, connexion à l’AIR rencontre des énergie ascendantes et descendantes région du cœur
Vishuddha, connexion à l’ETHER, région de la gorge
Ajna, connexion à l’esprit, milieu du front
Sahasrara, au-dessus de la tête connexion au divin

L’essai de localisation corporelle de ces centres les situent dans la colonne vertébrale conçue comme un axe central énergétique Shushuma, autour duquel s’enroulent les deux circuits respiratoires Ida et Pingmala, aboutissant à chaque narine et formant l’image classique du caducée.
Le travail des souffles PRANAYAMA vise à mobiliser l’énergie dans un circuit ascendant de «dynamisation» des différents centres pour une ouverture finale de la conscience.

Modestement il est possible de chercher à mieux percevoir, à détendre, à faire vivre et à relier par le souffle ces différentes parties du corps.
Depuis les pieds, la spirale du Taï Sabaki peut trouver une nouvelle dimension en reliant les différents centres jusqu’au sommet de la tête dans un barattage énergétique, parfois montré par Maître Ueshiba avec son Jo.

Cette «conscientisation de la gestuelle» et cette coordination des Principes chers à Maître Cauhépé peut -doit?- s’exercer certes sur le Tatami mais aussi en dehors dans une démarche de vigilance et de présence permanente à soi-même, aux forces naturelles qui nous environnent et à tous les »autres moi-même» humains.

«CELUI QUI VOIT LA REALITE EST TOUJOURS VAINQUEUR »

La pratique de l’Aïkido vise-t-elle ultimement, en stimulant et en orientant toutes nos énergies vers une Présence harmonisée, à faire s’épanouir une conscience plus vaste à chaque instant, vide de  saisie et de peur, sans volonté et sans attachement, mais potentiellement riche d’un geste naturellement juste qui en est alors le parfait témoignage ?
Comme une préparation à notre ultime transmutation finale ?

Stage ceintures noires Grimaud 18/1/15 (photo Den)