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Témoignages

Il était une fois …YAMA-ARASHI

par Tony Thielemans

(Tony Thielemans est un pionnier des Arts Martiaux notamment en Aïkido. Il est l’auteur d’un des tout premiers ouvrages en langue française et nous fait l’honneur du récit d’une époque héroïque en Belgique).

  Tout a débuté le jour où un jeune garçon de 16 ans assista, en 1953,  à une démonstration publique de judo et de self-défense donnée à Laeken à l’occasion d’une Fête de quartier. Il fut fasciné par ce qu’il voyait. A la même époque, la revue « Science et Vie » consacrait un article important sur ces disciplines peu connues. Sa lecture décida cet adolescent que j’étais à se documenter d’avantage et c’est ainsi que le 23 avril 1954, je  pousse pour la première fois la porte du dojo du « Judo-Club de Laeken », situé 24, rue de la Chanterelle, pour y prendre ma première leçon de judo. Je ne pouvais pas deviner, à cet instant, que cette décision allait être déterminante dans mon existence et tracer mon destin. Le professeur était M. Julien Naessens, ceinture noire 1er dan à cette époque, élève de Maître Jean de Herdt, 4e dan, plusieurs fois champion de France et d’Europe, et qui était lui-même disciple du Maître Mikinosuke Kawaishi, 7e dan, fondateur du judo en France. Le tapis (tatami) était composé d’une bâche de couleur beige en dessous de laquelle était entassé des copeaux de bois pour amortir les chutes ! C’était l’époque héroïque et peu de clubs existaient en Belgique. Les cotisations étaient bien plus élevées qu’à l’heure actuelle mais nous étions tellement heureux de pouvoir pratiquer cette nouvelle discipline. Les partenaires de l’époque dont je me souviens du nom étaient Roger Hannoset, Henri Dichlian, Clément Debruyne, André Jean, Vanderdonckt, Slagmuylder, Vanitsen, Mmes Naessens et Hannoset, Hervens, Delbol, Etienne Bauwens, Roger Cardon, Jim Barbé, Auguste Dherdt, Marcel Flamion, Larsimont, les frères Boffin, t’Kint, Gailly, Martegani … En ce temps-là bien des rumeurs circulaient au sujet de ces fous en espèce de pyjama blanc qui s’amusaient à se projeter, s’immobiliser, s’étrangler, se faire des clés de bras, etc…mais c’était aussi l’époque des films avec Eddie Constantine où cet acteur, qui était, disait-on, lui-même ceinture marron de judo, utilisait certaines techniques de judo et de ju-jitsu dans ses films. Et il faut avouer que nous n’étions pas peu fiers de dire que nous étions judokas  malgré que certaines mauvaises langues disaient que nous nous réunissions pour fumer de l’opium ! A part Henri Dichlian qui buvait ce qu’il appelait « une vieille cure » à savoir du coca –cola avec du sirop de menthe et qu’adeptes de la macrobiotique, nous prenions des cachets de sel marin afin d’être plus yang, rien d’anormal  dans notre comportement…

 Toute récente ceinture orange, je voulais déjà faire profiter quelques copains de mon savoir ( !) sur la self-défense. Nous répétions dans le grenier paternel, sur de vieilles couvertures, les mouvements de jiu-jitsu et les techniques de judo au sol que j’avais appris lors des cours que je continuais à suivre assidûment. C’est ainsi qu’en 1955, Roland De Vos, Constant Braet et moi-même avons décidé de donner un nom à ce petit groupe de copains. La langue japonaise était absolument inconnue et la seule référence que nous avions en ce domaine était le livre Ma Méthode de Judo de Kawaishi. Là, on pouvait trouver des mots représentant le nom de techniques tels que de ashi barai (balayage du pied avancé) ou harai-goshi (fauchage de la hanche) mais il aurait été étrange de donner un tel  nom, nous semblait-il, à ce groupe d’amateurs que nous étions. Après avoir lu et relu l’ouvrage de Kawaishi, je propose YAMA-ARASHI qui est dans la méthode Kawaishi le 14e de hanche et signifie « Tempête sur la montagne ». Notre enthousiasme débordant nous fait même faire fabriquer des insignes. Ils étaient de forme octogonale (excellent pour le feng-shui, mais nous ne le savions pas) et il y était indiqué « Yama-Arashi Jiu-Jitsu » car c’étaient surtout des mouvements de self-défense que nous répétions. Je ne crois pas au hasard et c’est bien plus tard que j’appris que cette technique était le mouvement favori de Shiro Saigo, élève de Maître Jigoro Kano, le fondateur du Judo et que lors d’un tournoi officiel, la victoire remportée par Shiro Saigo et son fameux yama-arashi firent la renommée du Judo par rapport aux autres écoles de jiu-jitsu. On peut donc dire que yama-arashi fit faire un pas décisif au développement et à l’étude du Judo.

Durant les années qui suivirent, je consacrais trop de temps à suivre mes cours auprès du Maître Naessens que pour pouvoir continuer ceux donnés dans le grenier paternel. J’allais non seulement rue de la Chanterelle mais également dans d’autres dojos ouverts par Maître Naessens : place de la Vaillance, rue Plantin et ensuite rue de Waelhem. Il y eut aussi les premiers stages suivis en aïkido et donnés par le Maître Tadashi Abe ; ensuite ce furent Maître Noro, Maître Tamura, Maître Mochizuki et Maître Murashige, 9e dan. Il y eut une approche de ma part auprès du karaté dont les cours étaient donnés par M. Verbruggen qui étudiait lui-même chaque week-end à Paris sous la direction du Maître Murakami et il y eut ensuite Maître Harada. Les pratiquants actuels d’aïkido et de karaté-do ne devraient pas oublier que c’est mon professeur, Maître Julien Naessens, qui a introduit ces nouvelles disciplines en Belgique en invitant ainsi des experts à venir donner des stages dans notre pays. Sans oublier Maître Kenshiro Abe, 8e dan pour le judo et aussi le champion universitaire du Japon, Maître Hara. 4e dan. Il y eut aussi des rencontres, des championnats, des démonstrations multiples auxquels j’ai participé durant cette période antérieure à mon 1er dan.

En 1958, l’année de l’Exposition Universelle à Bruxelles, ma mère qui travaillait avec une certaine Mme Boone, fit en sorte de me faire rencontrer le mari de celle-ci. Joseph Boone était ceinture noire de l’Ecole de Maurice Minne, précurseur du judo et du ju-jitsu en Belgique et fondateur de la fédération belge de judo. Il fut conquis par mon idée d’enseignement et c’est ainsi qu’en cette période héroïque des arts martiaux, un nouveau dojo fut ouvert le 4 janvier 1959 au 179, rue de Ribaucourt, à l’étage de l’arrière bâtiment d’un café (« In de Kempen »). Je l’ai dit plus haut, je ne crois pas au hasard, il se faisait qu’à cette adresse, mais au rez-de-chaussée, avait été créé un des premiers dojos à Bruxelles. Il était placé sous la direction de Maître Jean Perpeet, la première ceinture noire de judo de Belgique décernée par Maître de Herdt. Ce dojo fut ensuite repris par Maître Naessens qui le quitta plus tard, à son tour. On peut retrouver l’adresse de cet ancien dojo dans l’annuaire de Judo International, volume II, page 214, édité en 1950, et précisant la date d’ouverture de ce club par Maître Perpeet, le 15 octobre 1949 !

Donc, le 4 janvier 1959, est ouvert ce nouveau club d’aïkido et de judo et qui porte, bien entendu le nom de YAMA-ARASHI, né 5 ans plus tôt dans un grenier ! Le tatami était composé d’une bâche verte de 35m2 et en dessous de celle-ci, c’était du crin végétal piqué sur toile de jute ! Il n’y avait aucune arrivée d’eau… (donc pas de douches) et le chauffage était assuré par un poêle colonne alimenté de bûches de bois ! On se changeait derrière un rideau. Ma mère avait même confectionné des écussons de feutre à mettre sur le judogi et représentant une montagne jaune traversée par un éclair rouge symbolisant ainsi  «  la tempête sur la montagne » (yama-arashi).

 L’inauguration eut lieu devant une très nombreuse assistance, en présence de M. Jean Stas, président de la fédération belge de judo, de pratiquants d’autres clubs et également de beaucoup de curieux. Parmi les participants à la démonstration d’ouverture se trouvait M. Raymond Geirnaert, professeur du club T’Ai-Kih et l’une des premières ceintures noires d’aïkido de Belgique.

Puis ce furent les dix premières années d’existence du Cercle qui  en firent la notoriété et la réputation de son enseignement. Ce ne fut guère aisé mais dès la première année, en février 1959, on faisait déjà paraître un bulletin d’informations du club. Nous eûmes également la visite de professeurs et pratiquants d’autres clubs. Une démonstration fut même donnée en juin, avec notre demi-douzaine d’élèves débutants, à Hoeilaart à l’occasion de la Fête du Raisin et de l’inauguration du vin belge « Isca ». J’avais bien insisté pour que nous ayons un tapis pour amortir nos chutes mais lorsque je constate qu’une simple bâche avait été mise sur le podium et qu’il n’y avait que le plancher en dessous de celle-ci, j’avoue avoir tremblé pour les abattis de mes élèves. Mais ils avaient tous bien appris l’art de l’ukemi (brise-chute) et à part l’un des pratiquants qui, rejoignant sa place après un randori durant lequel il avait été projeté à plusieurs reprises, « légèrement » sonné, demande à son voisin de le prévenir quand ce sera son tour de participer à la démonstration…il n’y eut rien à déplorer si ce n’est mon nez qui n’arrêtait pas de saigner suite à un coup de genou donné par une de nos élèves, Ghislaine Cooremans, qui avait exécuté à la perfection sa technique de défense sur le coup de couteau que j’avais donné ! Et je faisais également, en même temps, le commentaire de la démonstration ! Imaginez-vous la scène ! Nous étions fous, à l’époque on utilisait de vrais couteaux pour les démonstrations mais les chutes spectaculaires sur le plancher du kiosque et le réalisme des techniques de self-défense agrémentées d’un saignement de nez nous valurent un énorme succès auprès du très nombreux public présent. En juin, une autre démonstration est faite à Anvers pour les Jeunesses Arméniennes et je me souviendrai toujours du périlleux voyage que nous avons fait pour nous y rendre dans la camionnette Volkswagen louée et conduite par notre élève, Asadourian, qui était celui qui avait été contacté pour l’organisation de cette démonstration. Il n’y avait qu’un seul problème, M. Asadourian savait à peine conduire (le permis n’existait pas à l’époque) et nous avons failli ne jamais arriver à Anvers en bonne forme ! En novembre, nos élèves participent au stage de judo donné par Maître Kenshiro Abe et au stage d’aïkido du Maître Tadashi Abe au Judo Club de Belgique.

En février 1960, Yama-Arashi fait partie des 12 clubs fondateurs de la Fédération Belge de Karaté, première fédération nationale de karaté. En mars, un cours de karaté, qui est une toute nouvelle discipline enseignée en Belgique, débute sous la direction de Monsieur Raeymackers, cours qui sera dirigé ensuite par Monsieur Christiaens. Le 19 juin, une deuxième salle est inaugurée avenue Fonsny. En septembre un cours spécial pour juniors est inauguré et en octobre, Monsieur Joseph Boone, pour des raisons professionnelles et également d’ordre familial, se retire du monde des arts martiaux.

Le 25 mars 1961 se déroule le premier championnat Yama-Arashi et le 1er avril (et ce n’est pas un poisson d’avril) j’abandonne mon métier de bureaucrate  pour me consacrer à plein temps à l’enseignement des arts martiaux et devenir donc professeur professionnel dans ce domaine. A la même époque on transfère le dojo de l’avenue Fonsny à l’avenue Jean Volders. En août, un cours de ju-jitsu donné sous la direction de Monsieur Wanègue voit le jour et en octobre, Mademoiselle Claudine Van Lembergen est nommée ceinture noire de judo. Elle est la plus jeune ceinture noire féminine de Belgique et elle a 16 ans. En décembre, nous participons aux championnats du Hainaut, une démonstration est donnée à Dilbeek et nous reprenons le dojo de Maître Jean Lindebrings, une des premières ceintures noires d’aïkido en Belgique, situé au Grand Sablon au 40, rue Ste Anne. Maître Murashige, 9e dan, y donne un stage d’aïkido au cours duquel il nomme l’un de nos élèves, Monsieur De Visscher, 1er dan.

Le 24 février 1962 ce sont les seconds championnats du Cercle. A la même époque, une équipe de Yama-Arashi participe à des championnats inter-clubs bruxellois et remporte la victoire. Le 14 mars, à la fin d’un stage d’aïkido, Maître Murashige me décerne le 2e dan et nomme mes élèves Jean Giraldo et Luc Martiny 1er dan. Le 31 mars, une démonstration est faite à Louvain par 24 de nos membres et en avril, c’est Monsieur Pongchai Jayankura qui reprend la direction des cours de karaté dans notre Cercle. Nous abandonnons la salle de l’avenue Jean Volders (le plafond en dessous du dojo s’écroulait). C’est aussi durant cette période que j’accompagne le Maître Murashige, 9e dan, à Paris et serai son uke lors du stage donné dans le dojo de Maître Nocquet. Le 26 août est inaugurée la salle du 125, avenue de l’Hippodrome et le 2 septembre, Maître Kawaishi me décerne le 2e dan judo et le 1er dan à Messieurs De Visscher et Martiny. En septembre, une section kendo est créée. Le 25 novembre, naissance d’une section  arts martiaux à l’Académie Paul Sprimont et le 21 décembre une démonstration est donnée à l’Athénée de Bruxelles où une section budo sera créée en mars 1963.

C’est aussi en 1963, le 19 janvier, que se déroule le premier bal organisé par le Cercle et le 2 mai eut lieu une démonstration  pour les Festivités de Molenbeek. Du 15 au 31 juillet, nous organisons notre premier camp de vacances à Chiny. En septembre, Monsieur J.P. Devaux reprend les cours de karaté donnés dans notre école et en novembre, une section budo est inaugurée à l’Athénée Royal de Rixensart, Le 15 du même mois, Jean Giraldo, un de nos premiers inscrits au club et dont la pratique avait été interrompue par le service militaire, est nommé 1er dan judo .

Une grande soirée cinématographique sur les arts martiaux diffusés  dans notre Ecole  est organisée par le Cercle le 14 février 1964 et c’est à la même époque que le 3e dan en aîkido m’est délivré. Le 4 mars, Maître Aritomo Murashige, qui avait été délégué, jadis, avec Maître Minoru Mochizuki, par le fondateur du judo, Maître Jigoro Kano, auprès du Maître Morihei Ueshiba, fondateur de l’aïkido, pour y étudier cet art martial, trouve la mort dans un accident de voiture près de Liège. Le 20 mars, Messieurs G. Baeveghems et M. Couck  sont reçus 1er dan judo. Le 11 avril se déroule le 2e bal du Cercle durant lequel une très belle démonstration est donnée et, du 16 au 31 juillet, c’est à Grand’Mesnil qu’a lieu le 2e camp de vacances Yama-Arashi. Une démonstration est donnée à Hofstade le 23 août et une autre le 10 octobre aux Grands Magasins l’Innovation (on ne peut pas dire qu’on n’essaye pas de diffuser les arts martiaux auprès du grand public !). Le 7 novembre se déroulent les troisièmes championnats du Cercle et le 31 décembre a lieu son premier réveillon  en la salle de fêtes aménagée grâce à Monsieur Jean Faure, au-dessus du dojo de la rue de Ribaucourt, dont il était devenu responsable.

Après ces 5 premières années d’existence de Yama-Arashi, nous n’allons pas continuer à énumérer tous les évènements tels que rencontres inter-clubs, championnats, démonstrations, camps de vacances, bals, nouveaux cours, autres chargés de cours, affiliations de nouveaux clubs en Belgique, résultats d’examens, obtention de divers grades dan, etc…Nous n’aurions pas assez de place. Nous retiendrons seulement la création par le Cercle Yama-Arashi, le 26 août 1965, de l’Association Belge d’Aïkido, Kendo et Arts Martiaux (ABAKAM) qui deviendra par la suite une fédération nationale reconnue par le Ministère de l’Education Nationale et de la Culture ; le stage de kempo donné le 6 septembre 1965 par le Maître Katsunori Watanabe  et le cours de karaté donné le 6 octobre par les experts Takaaki Uestsubura et Naohide Tanaka de l’Université de Meiji.

Le 13 mars 1966, stage de judo donné par le Maître Hara, 4e dan, champion universitaire du Japon ; également en mars arrivée d’un nouvel expert d’aïkido, Maître Tsutomu Akiyama, 3e dan, qui donnera cours durant près de deux ans dans notre école. Le 1er mai de la même année 1966, inauguration d’un club Yama-Arashi à Coventry en Grande-Bretagne et visite d’une dizaine de ses membres en septembre. Le 24 septembre stage de kendo donné sous la direction de Maître Knutsen, 3e dan et le 12 octobre stage de karaté donné par Maître Harada, 5e dan. Le 1er décembre, Maître Kotaro Hokage, 3e dan kendo accepte de donner cours dans notre Cercle. Toujours en décembre, Maître Oshima, 5e dan karaté nous rend également visite.

C’est en 1967, du 13 au 15 janvier, que Yama-Arashi organise l’Hatsu Geiko Européen de Kendo avec la participation de nombreuses délégations européennes (Allemagne, Angleterre, France, Hollande et Suède) et plusieurs experts de kendo dont Tadaktsu Shiga, Kotaro Hokage et Roald Knutsen. Le Comte von Sandor, président de l’European Kendo Renmei, nous remet le document officiel donnant à notre organisation la représentativité du Kendo en Belgique. La télévision retransmet une partie de cette manifestation. C’est aussi lors de cet Hatsu-Geiko que je fis la connaissance de celui qui allait devenir mon ami : Daniel Royer et  plus tard, de mon autre ami, François Fort. Toujours en janvier, stage de judo donné sous la direction du Maître Morioka 6e dan et fin janvier je donne un stage d’aïkido en Angleterre aux membres du club Yama-Arashi Coventry. Les 3 et 4 juin, Maître Tadakatsu Shiga donne un stage de kendo dans notre Cercle. En juillet sort mon livre sur l’aïkido et le kendo (« le guide Marabout de l’aïkido et du kendo ») qui deviendra un best-seller dans tous les pays où l’on parle français et même ailleurs. Il a été repris dans la bibliographie de nombreux ouvrages traitant de cette discipline (dont celui du Maître Tamura par exemple) et même dans certains ouvrages de philosophie d’extrême orient (après 3 rééditions, introuvable aujourd’hui). Du 14 au 22 octobre, le professeur Pat Stratford, dirigeant du club de Coventry vient avec une douzaine de ses élèves suivre les cours d’aïkido dans notre école.

Le 21 janvier 1968, je donne à nouveau un stage en Grande-Bretagne et le 2 mars, nous inaugurons un nouveau cours : le yoga donné sous la direction de Monsieur J.P. Cuypers. Les 23 et 24 mars, plusieurs membres m’accompagnent à Paris pour suivre un stage d’aïkido donné par le Maître Hiroo Mochizuki (fils de Minoru Mochizuki) et Tadakatsu Shiga en kendo. Suppression du dojo de l’avenue de l’Hippodrome. Du 13 au 22 septembre, une vingtaine de représentants des clubs anglais viennent nous rendre visite et ont l’occasion de suivre un stage d’aïkido donné dans notre Cercle par Maître André Nocquet, 6e dan, qui fut le premier français à se rendre au Japon pour y suivre l’enseignement du Maître Ueshiba. Le 5 octobre, Maître Ishikawa, 3e dan, donne un stage de karaté à Yama-Arashi et les 8 et 9 novembre, un stage de judo est donné dans nos dojos par Maître Morioka, 6e dan.

Le 31 janvier 1969, Maître Kawaishi décède dans sa 70e année. En février je suis nommé président de la Chambre Professorale  de Judo, reconnue par le Conseil d’Etat. Lors de l’assemblée générale du 9 mars, les votes du Collège National des Ceintures Noires Judo et Sports Assimilés me portent à la présidence de cette organisation nationale. Les 27 et 28 mars, stage de judo donné dans notre club par Maître Morioka et visite de plusieurs membres britanniques du 4 au 8 avril. Du 20 au 26 juillet, accompagné d’une dizaine de membres, je donne un stage d’aïkido à une soixantaine de pratiquants britanniques dans le plus grand centre sportif d’Europe : le Crystal Palace à Londres. En septembre, Yama-Arashi crée l’European Budo Association.

  Après ces 11 premières années d’existence de Yama-Arashi, nous ne continuerons plus, dans cette rétrospective, de parler des stages avec les experts et de visites auprès de clubs étrangers ainsi que d’autres activités qui ne cesseront de se faire durant ce demi-siècle. Il faut souligner cependant l’organisation d’un voyage au Japon en juillet 1970, durant lequel, guidés par le Maître Nakakura, 10e dan kendo, nous avons été reçus par Maître Ichiro Abe au Kodokan, par Maître Shioda au Yoshinkai, à l’Aïki-Kai, au Dojo Impérial, etc…En 1971, l’ABAKAM, fédération créée en 1965 par Yama-Arashi, change de nom et devient l’Association Belge d’Arts Martiaux Japonais. C’est également en 1971 que Yama-Arashi ouvre un troisième dojo à Bruxelles au 17, rue Verbist à Saint-Josse. En 1972, notre organisation est reconnue par la « Federation of European Karate-do Organisations » (F.E.K.O.) comme représentant du karaté wado-ryu en Belgique. Fête des 5 premiers jubilaires du Cercle ayant suivi sans interruption les cours durant 10 ans (Messieurs Coppens, Couck, Jacobs, Lielens et Pallant). En septembre 1972, ouverture d’un nouveau club Yama-Arashi au complexe sportif de Laeken, 73/89 rue Champ de l’Eglise.  En 1974, nous organisons un second voyage au Japon pour nos membres. En mai 1978, suite à la vente du bâtiment, suppression du dojo de la rue Verbist. Les années suivantes virent l’abandon du premier dojo de la saga de Yama-Arashi et qui était situé au 179, rue de Ribaucourt, mais également la naissance, le 7 janvier 1985, de Yama-Arashi Budokan, au Palais du Midi, le plus grand dojo de Belgique, avec ses 4 tatamis de 100 m2. En 1994, une réception à l’Hôtel de Ville de Bruxelles par le Bourgmestre, Monsieur Freddy Thielemans et l’Echevin des Sports, Monsieur Olivier Maingain, en présence du Directeur du Service des Sports de la Ville, Monsieur Guy Van Biesen et de nombreuses ceintures noires du Cercle, suivi d’un banquet, fêtent le 40e anniversaire de Yama-Arashi. Ensuite ce fut un sombre évènement qui se produisit en 1995 : l’antiquaire  installé en-dessous de notre dojo au Grand Sablon fait des travaux d’embellissement et abat un mur de soutien. Les murs de notre local deviennent convexes et tout menace de s’écrouler. Nous sommes obligés de quitter, du jour au lendemain, ce dojo qui connut la renommé durant tant d’années et le 10 janvier 1995 s’y donnera le dernier cours.  Des piliers seront installés dans ce local rendant, de ce fait, impossible la pratique des arts martiaux que nous y enseignions. L’ambiance club qui y avait régnée durant 34 ans était détruite à jamais. Puis ce fut le 45e anniversaire avec sa réception à l’Hôtel de Ville et le banquet qui suivi, grâce à notre membre Monsieur Willy Roesems, au Royal Golf Club de Belgique. Le 1er octobre 2005, toujours à l’Hôtel de Ville, dans le Cabinet du Bourgmestre, fut remise par celui-ci, la médaille commémorant les 40 ans d’assiduité au Cercle, sans interruption, à Monsieur Jean Jeurissen, professeur de judo et ceinture noire 6e dan.

Et à présent, ce 4 janvier 2009, après ses 50 années d’existence, Yama-Arashi obtient du Palais la reconnaissance au  titre de « Royal » et pourra donc s’appeler  dorénavant, et à partir de cette date, « ECOLE ROYALE D’ARTS MARTIAUX YAMA-ARASHI BUDOKAN ».

Yama-Arashi n’aurait pu être ce qu’il est sans l’aide et le dévouement de ses professeurs, moniteurs, ceintures noires et collaborateurs. En 50 ans la liste est longue et je risque d’en oublier. Certains ont déjà été cités dans ce petit historique mais je dois y ajouter René Ghislain, Philippe de Mal, Julien Peetermans, Gil Gräffe, Willy Warens, Jean-Marc Snoeck, Philippe Tinant, Jacqueline Coja, Ilona Strachinaru, René Liegois, Marc Devillez, Louis Duguay, Philippe Kennes, Luc De Smedt, Nicolas Coppens, Ushin Muhadri, Daniel Mukalenge, sans oublier les anciens tels que François Speliers, Jean Faure, Gérard Baeveghems, Marie-Jeanne et Willy Roesems, Albert Jacobs, André Pallant, Georges De Greef, Josée Herman, Charles Van Deuren, Paul Vandenbosch, Marc Vanhaecke, Philippe Leboeuf, Jean-Paul Hebette, Guy Gilis, André Flon, Alain Leroy, Maria Everaert, Salomon Engels, Michel Dury, Egidio di Egidio, Albert Deyck, Bernard Delbauve, Henri Behr, Auguste Legrève, Pierre Debaeremaecker, Robert Cumps, Jean-Paul Coja, Gustave Bultynck, Henri Bregy, Marie-José Servaye, Claudine Minet,    Jacques Dupont, Guy Reumont, Pierre Van Dosselaere, Raymond Lielens, Paul Sonnemans, Chantal Deverver, Jeanine et Raymond Vandersmissen, Christian Colin, Jacques Gerbaud, André Toussaint, Alain, Henri et Laurent Plichart, Egide Wagener, Rose-Aimée Dudique, Florent Corne, Roger Hoedenaeken, Gilberte Harmegnies, René Bonfond, Pierre Delobel, Jacques Vervecken, Yvan Dhondt, Marcel Dieu, Willy Nootens, Jean Baeten, Yves Capaert, André Quataert, Jean Giraldo, Adolphe De Visscher, Luc Martiny, Roland Quenon, Claudine Van Lembergen, François Coppens, Marcel Désiront, François Meert, Roger Meert, Tom Moss, Chris Rouse, Jan Vleugels, Jean-Pierre Cuypers, Marc Druet, Julien Benoit, Georges Cheyns, Alain van Leckwijck, Gilles de Muyser, Philippe Vrebos, Julemont, Anne-Marie Thiroux, Valeria Selleri, Vinciane Leleux,   sans oublier, bien sûr, mon épouse Joëlle Manuzzi qui fut professeur de yoga dans notre Cercle et est l’actuelle présidente de Yama-Arashi et de la future Ecole Royale ! Toute ma reconnaissance va également à mes défunts parents qui m’ont toujours soutenu et encouragé dans mes projets et à mon professeur, feu Maître Julien Naessens, qui me montra le chemin de la technique mais aussi celui de l’esprit des arts martiaux.

J’ai certainement oublié certaines personnes dans cette liste et je demande de bien vouloir m’en excuser. J’aurais pu également citer d’autres évènements, comme, par exemple, la victoire de notre club et de certains membres dans de nombreux championnats nationaux et internationaux, les fréquentes visites du Maître Tatsuo Suzuki, 7e dan, représentant officiel en Europe du karaté wado-ryu, la régionalisation des fédérations et la nomination de Monsieur Jean Jeurissen à la présidence de la branche francophone de l’ABAMJ, notre reconnaissance auprès de la Ville de Bruxelles et de la Commission Communautaire Française et de l’aide que ces organisations apportent à notre Cercle, des plus de 150 ceintures noires qui ont été formées dans notre Ecole et dont certaines ont ouvert, à leur tour, des salles d’arts martiaux en Belgique et à l’étranger, des contacts que nous continuons à entretenir avec les autres clubs, fédérations et organisations de BuDo, etc… J’aurais pu également  parler de ma participation aux Commissions Pédagogiques ADEPS en judo et en aïkido, mais ceci est une autre histoire comme aurait dit Kipling.

Au moment où j’écris ces lignes, 14.836 personnes ont suivi nos cours dans les diverses disciplines enseignées.

Je pense avoir taillé, de mon mieux, ma pierre brute pour la placer dans l’édifice du BuDo et je terminerai, comme l’a dit Emile Verhaeren : « A ceux qui viennent…Ayez des cœurs plus hauts, des gestes plus parfaits et faites, mieux que nous, ce que nous avons fait ».

Clara

Clara,

Tu vas trouver que c’est une drôle d’idée de faire un article sur toi!

Et pourquoi pas?

Si l’on veut évoquer la douceur, la fidélité, la discrétion, tous ces mots qui te caractérisent, mais aussi, ta présence dans le dojo, ta persistance dans la pratique en Aïkido.

A travers toi, rendre aussi un hommage aux femmes sur les tatamis, et à celles, peu nombreuses qui assument une longue pratique.

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Cet art magique n’abime pas les corps (quoique… ton doigt de pied accidenté me fait mentir). Il n’est besoin ni de muscle ni de force, juste trouver sa place dans un monde … disons … masculin, même si nos pratiquants sont des modèles de fair-play et de courtoisie.
Depuis combien de temps partageons nous ces stages, ces séminaires? Durant toutes ces longues années à l’Abbaye de Saint-Pierre de Canons où après les journées riches en pratique, nos soirées débat ou spectacle restent des souvenirs inoubliables.
Tes talents de meneuse de revue, et tes numéros quasi professionnels étaient bluffants (photos d’époque!)
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Aujourd’hui, t’avoir à mes côtés dans cette aventure des cours d’AIKI DEN ZOU  au service des séniors est pour moi essentiel, et je t’en suis très reconnaissante (ainsi que Fred bien sûr).

Ton grand secret, égal au mien, c’est que nous pratiquons aussi en « tandem », par forcément avantageux, mais tellement mieux!.

Qui d’autre que nous peut dire que l’AIKIDO c’est l’AMOUR !

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Respect, complicité et affection petite soeur… ne lâchons rien.
Den

 

Denis

Nous avons la chance dans notre Ecole de réunir des individualités, des caractères et des tempéraments de qualité aussi bien dans leur vie personnelle que dans leur pratique de l’Aïkido notamment des bons Uke.

Qu’est ce qu’un bon Uke?

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En direct des volcans d’Auvergne

Merci à Colette pour ce message transmis par SMS.

Colette, un volcan pas éteint (photo Den)

Colette, un volcan pas éteint (photo Den)

« Je ne sais si c’est nous qui allons vers l’Aïkido ou si c’est l’Aïkido qui vient vers nous.
Il faut toutefois un chercheur, un guide, un maître pour poser et faire croître en nous la foi en ce chemin.
50 ans d’Aïkido, c’est énorme.
Les centaines d’années de pratique  de nous tous réunis, çà c’est immense. Merci d’être celui que l’on a envie de suivre, d’être initiateur de mouvement de vie.

Gros becs »,

Colette Garneau

Dans tes pas

Laurent parle peu mais comme souvent, les paroles n’en ont que plus de valeur. Avec sa permission, nous reproduisons son discours malgré nos hésitations à être sous les feux des compliments. Mais quand on a la chance d’avoir un écrivain de talent…

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Jean-Daniel Cauhépé (1933-2013)

Il y a un an disparaissait Jean-Daniel Cauhépé. Comme nous l’avons écrit par ailleurs, nous le considérions comme un grand frère car il avait commencé l’étude de la Voie bien avant nous et l’avait poursuivie toute sa vie.

Nous fîmes sa connaissance en 1970 au stage de Marseille organisé par la Fédération Française d’Aïkido (FFAD) durant une semaine. Nous avions été prévenu avec trois critères qui nous interpelèrent:
« Il a un Ki extraordinaire.
C’est un cherchant, (c’est-à-dire un chercheur spirituel).
Il est théâtral ».
Les renseignements s’avérèrent justes et n’étaient pas pour nous déplaire!
Etait-ce l’amorce ou l’annonce d’un lien, toujours est-il que nous fumes appelé comme Uke, et c’est là que nous fûmes secoué!

Mais faisons un retour en arrière.

Né en 1933, fils d’un Professeur de médecine, père de la stomatologie française, Jean-Daniel (JD) fit la guerre d’Algérie comme officier parachutiste.
C’était un guerrier!
Son boulot était de « détruire un nid de mitrailleuse » et le destin voulut que les balles sifflaient près de lui fauchant ses hommes et le laissant indemne.

On peut supposer que sa maitrise de la mort, une des qualités du Hara date de cette époque.

Il commença les arts martiaux par le Judo puis l’Aïkido avec son frère Yves devenant les premiers élèves d’André Noquet à son retour du Japon en 1958.

En plus d’être un guerrier au regard tranchant comme l’acier et au Kiaï terrible (les anecdotes sont impressionnantes), c’était un homme très cultivé ayant posé très tôt une recherche analytique qui sera à la base des publications suite aux synthèses en coopération avec A. Kuang. Homme de laboratoire plus qu’enseignant désirant partager, nous étions un peu ses « éprouvettes » grâce auxquelles il faisait ses expériences!
C’était déjà le cas lors de notre première rencontre où comme nous le disions, nous fûmes choisi comme Uke.
Les attaques ne lui convenaient pas du tout. Trop jeune et surtout trop tendre!

« Ah, la banane! »

Tout le monde fut choqué (cela nous fut rapporté) et nous aussi!

Mais non, ce n’était pas une insulte mais une motivation pour exciter Uke.

« Attrape la banane! »

Ah bon, fallait le dire. S’il n’y a que cela pour lui faire plaisir, alors allons-y!

"Attrape la banane!"

« Attrape la banane! » (Marselle 1970)

Et là, le gentil Uke va devenir « méchant », hyper-yang type félin.
De cette expérience de dressage, nous garderons cette habitude au point d’être responsable d’accidents malheureux et regrettables lors d’examens sur des candidats qui n’avaient pas été dressés « la botte sur la tête ».
Ce qui nous attirait chez lui, ce n’est pas tant le technicien que l’artiste toujours dans la créativité et l’innovation. Il fut très tôt influencé par Tohei Koichi au point de ne pas retrouver l’influence de son  professeur comme c’est généralement le cas.  Ce n’était pas un artisan mais vraiment un artiste libre qui créait son Aïkido.

La rencontre en 1978 avec Tohei Koichi qui démontrait un Aïkido subtil plus les problèmes chroniques de fédération amenèrent la création d’un nouveau groupement (FFKA) avec comme référence le Ki et l’Aïkido de l’ancien chef instructeur de l’Aïkikai.
Hélas, une direction technique bicéphale n’est pas l’idéal et cette jeune fédération ne put résister aux pressions internes. Etait ce la seule raison? Certainement pas. Toujours est-il que nous nous retrouvâmes « orphelin » et comme il n’était pas question de retourner dans une autre fédération attirée par nos cotisations et sans aucune reconnaissance, le principe d’une Ecole autonome s’imposait.

C’est ainsi que naquit l‘Ecole Tenchi d’Aïkido en 1987, Ecole composée de Dojos semi-autonomes et sans directeur technique, mais ouvert à toute personnalité dont JD en particulier. Comme il n’était pas question d’être incorrecte, la droiture imposait de lui annoncer cette naissance lors d’un dîner… Sur le coup, nous fumes déçu par sa réaction mitigée, réaction que nous pûmes mieux comprendre des années plus tard en apprenant qu’il avait fondé son Ecole en …1986 avec notre ami Christian Laurenti. Le fait de ne pas avoir été invité à faire parti de ce groupe vu nos liens n’était pas un problème, mais le secret de cette création à l’origine et à posteriori resta surprenant.

Chacun est libre et maître de ses choix comme dans l’histoire de sagesse suivante:

« Un sage méditait au bord d’un ruisseau lorsqu’un scorpion entreprit de traverser le courant d’eau. Le voyant en difficulté et sur le point de se noyer, le sage le prit et le déposa mais ce faisant, le scorpion le piqua. Celui-ci, têtu, entreprit une nouvelle traversée et à nouveau commençait à se noyer quand le sage le sauva. Mais le scorpion le piqua encore. Un spectateur qui avait assisté à la scène s’exclama:
Pourquoi vous obstinez-vous à le sauver puisqu’il vous pique?
Et le sage répondit:
Sa nature est ainsi…
Si ma nature est bonne, pourquoi voulez-vous que je la change »?

Fidèles à nos principes, cela ne nous empêcha pas d’inviter JD en stage,

En stage à Gogolin (1993)

En stage à Cogolin (1993)

 

en séminaire à l’Abbaye en 1994,

En séminaire de 4 jours à l'Abbaye (1994)

En séminaire de 4 jours à l’Abbaye (1994)

et à l’occasion du 20e anniversaire en 2007 où différentes figures qui nous accompagnèrent  au long de notre cheminement, nous firent la surprise de répondre à l’invitation « secrète » de Den.

A l'Abbaye pour le 2Oe anniversaire de l'Ecole Tenchi d'Aïkido

A l’Abbaye pour le 20e anniversaire de l’Ecole Tenchi d’Aïkido (2007)
A gauche de JD, Igor Vassilieff qui fut le Président de la FFKA en 1978

 

Nous avons déjà expliqué pourquoi le principe d’une Ecole était préférable à une organisation lourde et multicentrée. Plus une structure administrative et relationnelle devient complexe, plus elle devient fragile. Nous ne pouvons donc qu’adhérer et encourager les initiatives de type Ecole autonome. Le principe Aïki est déjà difficile à réaliser pour l’individu mais pour  un groupement, cela devient mission impossible!

Au-delà des organisations, des stages mémorables nous réunissaient comme à Trets (1982), mais surtout des soirées où ses talents de danseur s’exprimaient au grand jour (ou plutôt la nuit!).

Son déplacement « secret » en 1983 pour rencontrer Tohei Koichi en Italie ne fut pas un succès. Nous ne nous étendrons pas sur les raisons; disons simplement que la recherche du vide  en Aïkido ne veut pas dire faire le vide autour de soi! Nous en ferons nous-même l’expérience 4 ans plus tard avec un entourage qui veut garder jalousement son sensei pour lui.
Etre maître en Aîkido est une chose, être maître dans la vie en est une autre!
Si une lanterne allumée brille plus facilement entourée de lanternes éteintes, la transmission de la lumière ne pourra pas se faire!
On comprend dès lors pourquoi l’influence de Tohei Koichi resta limitée en France et en Europe.

Ces liens qui n’arrivent pas à se nouer engendrent un point positif. Le chercheur reste un loup solitaire et il ne doit compter que sur lui pour avancer. C’était le cas de JD qui avait dépassé les influences des experts rencontrés pour s’approprier « son Aïkido » (transmission traditionnelle Shu Ha Ri).

Nous ne parlerons pas de l’homme en dehors de l’Aïkido étant du domaine privé. Les 18 derniers mois de sa vie furent à la fois très douloureux et à la fois très riche d’évolution spirituelle. Son épouse l’accompagna avec un dévouement extraordinaire de tous les instants digne d’admiration.

Même avec une pédagogie particulière, c’était un homme de transmission…de Ki.
C’est ce qui nous a séduit.
C’est ce que nous avons reçu.
C’est pourquoi nous lui en sommes reconnaissant.

Et même si tu ne danses pas sur les nuages,

Merci l’artiste!

JMT

Abe Tadashi (1926-1984)

Personnage clef du développement de l’Aïkido en France, Abe Tadashi présente une personnalité très particulière dans le monde des arts martiaux.

Nous ne l’avons pas connu, aussi ferons-nous appel aux témoignages de ses élèves comme Pierre Warcollier et ses fils Alain et Jean-Pierre.

Il est né en 1926, issu d’une riche famille dont le père, homme d’affaires et élève de Maître Ueshiba, participe au financement du Kobukan Dojo.

Tadashi débutera l’Aïkido à l’âge de 16 ans en 1942 et deviendra Uchi-deshi à Iwama. Notons que 1942 correspond à la deuxième expérience spirituelle d’O Sensei.
Il sera nommé 6e Dan en 1952.

Il n’échappe pas à la situation de guerre où même les enfants sont amenés à participer jusqu’au bout. Officier de marine, il sera enrôlé (manipulé?) comme Kamikaze sur les fameux Kaiten (traduction: « Départ pour le ciel »), torpilles transformées en sous-marin avec une tonne et demi d’explosifs qui furent un échec pour le Japon. il sera épargné par l’arrêt de la guerre.

En 1952, Maître Ueshiba l’envoie en France un an après la visite de Mochizuki Minoru (1907-2003).

Mochizuki Minoru

Mochizuki Minoru

Il a 26 ans, étudie le droit et introduit l’Aïkido grâce à Kawaishi Mikinosuke (1899-1969) le « père » du Judo en France.

Kawaishi Mikonosuke

Kawaishi Mikinosuke

Sur ses conseils, il mettra au point une codification française (cf bibliographie).

Irimi-nage par Abe Tadashi

Irimi-nage par Abe Tadashi

Il développera l’Aïkido en France et en Europe jusqu’à son retour en 1960.

Objectif: efficacité!

Objectif: efficacité!

La pratique d’Abe correspond à la période d’évolution symboliquement représentée par un cercle dans un carré (Aïki-budo) qui succédera à la période Daïto-Ryu Aïki-jutsu des années 1920-1930 (aspect carré), avant la période 1950-1960 (symbole du cercle). Cette façon de découper l’évolution de l’Aïkido est schématique et correspond à l’évolution mentale et spirituelle du fondateur. Si Kishomaru a une personnalité propre et « son Aïkido » qui a influencé les futurs cadres, on ne peut dire pour autant que l’évolution circulaire et spirale de l’Aïkido soit de son seul fait sous prétexte que le fondateur se partageait principalement entre Iwama et Tokyo. Cette évolution est d’abord et avant tout l’oeuvre de la conscience hors du commun du fondateur.

A Iwama, ses condisciples s’appellent Tohei Koichi (1920-2011) qui commença en 1939 (était-il « carré » pour autant?)

Tohei Koichi

Tohei Koichi

et Saïto Morihiro (1928-2002) qui commença en 1946.

Saïto Morihiro

Saïto Morihiro

Sa réputation de « tueur » et de tête brulée était-elle due à son  mental de guerrier destiné à mourir à 18 ans au combat?
Quelques anecdotes semblent l’infirmer.
Au Japon, Abe qui aimait l’alcool et la bagarre, se plaisait à tester ses connaissances martiales dans les bas-fond. Le lendemain d’une rixe, il se présenta devant Maître Ueshiba et raconta fièrement:

« Ils étaient six, armés de couteaux et je n’ai eu que cela »

montrant une estafilade sur son avant-bras.

« Vous n’avez rien compris à l’Aïkido »,

fut la réponse d’O Sensei!

Le jeune Tadashi avait beaucoup d’admiration pour le fondateur et aimait passionnément l’Aïkido et il voulait rivaliser avec Tohei. Il avait l’obsession de le vaincre et il échoua dans ses défis notamment à Osaka. Le seul témoin de cette défaite fut son neveu, Yamada Yoshimitsu, alors adolescent, qu’il frappa sous le coup de la rage et de l’humiliation! Celui-ci devint Uchi-deshi en 1955 puis émigra aux Etats-Unis.

Yamada yoshimitsu

Yamada Yoshimitsu

Pierre Warcollier nous racontait qu’il l’avait félicité d’avoir esquivé son attaque au bâton car selon ses mots:

« Moi, mortel à 6 mètres! »

En France, il ne s’était pas assagi. En sortant d’un stage et voyant la voiture neuve d’un pratiquant, il la défonça d’un tsuki (bien que ne pratiquant pas le Karaté, ses mains étaient déformées au niveau des Kento par le makiwara):

« Ah Ah, voiture neuve« 

dit-il en rigolant et en sortant des billets de banque pour le malheureux propriétaire qui ne pouvait que protester!

Une autre fois:

« Nous aller bois (le bois de Vincennes).
Un seul revenir! »

Son regard de félin hyper yang ne passait pas inaperçu comme dans ce restaurant où rendez-vous avait été pris pour régler un différent avec des gens du milieu qui préférèrent prendre la fuite en le voyant.

Tout laisse supposer que ses affaires à la fin de sa vie l’amena à fréquenter le milieu. Une photo le montre entouré de …deux gardes du corps!

A son retour au Japon, en 1960, il critiqua l’évolution circulaire et considérée par lui comme « féminine », ne reconnaissant pas « son Aïkido » carré et guerrier. Il refusa le 7e Dan, rendit ses certificats et quitta l’Aïkikai.

Les années suivantes verront l’arrivée d’experts délégués pour propager l’Aïkido en occident à partir de la France:

1961: Noro Masamichi (1935-2013)

1962: Murashige Aritomo (1895-1964)

1963: Nakazono Mutsuro (1918-1994)

1964: Tamura Nobuyoshi (1933-2010)

                                  JMT

Murashige Aritomo (1895-1964)

Nous n’avons pas connu ce Maître d’arts martiaux (1895-1964), aussi citerons nous Jean-Daniel Cauhépé qui fut son Uke en 1962 et Jean-Pierre Paillard qui fut son élève.
Issu d’une famille de guerriers, Aritomo (Aritoshi, son prénom au Japon) commence l’étude des Budo par le Kendo à l’âge de 13 ans, adhère au Dai Nippon Butokukai de Kyoto à 19 ans, débute le Judo avec le fondateur Kano Jigoro à 20 ans, puis le Katori-Shinto-Ryu avec Mochizuki Minoru.
En 1931, Kano envoie certains de ses élèves (dont Mochizuki et Murashige) étudier l’Aïki-Budo de Maître Ueshiba encore très proche du Daïto-Ryu.
« C’est le Budo idéal » estimera Kano Jigoro en voyant O Sensei, ce qui montre l’admiration pour le Budoka et son art sans pour autant dévaloriser sa discipline.
Murashige Aritomo deviendra expert et haut gradé dans nombre de Budo (Judo, Iaïdo, Kendo…) et de Bujutsu (bâton, lance, hallebarde, poignard…). En Aïkido, il recevra le 9e Dan à l’âge de 65 ans en 1960.
Au contact de Maître Ueshiba, il deviendra adepte de l’Omoto-kyo (Branche Shintoiste) et sera initié à l’art des sons et des incantations (Ho-jutsu).

Son mental était d’une autre époque avec une réputation de « tueur » où l’art martial (Bujutsu) au sens propre est une question de vie ou de mort, bien différente de la brutalité et des transferts d’agressivité.
Un jour, notre ami JP Paillard, passant devant Murashige qui était assis, reçoit de sa part un coup de pied au bas-ventre avec pour tout commentaire:
« Ca aussi, c’est Aïkido! »
C’était sa façon à lui d’enseigner la vigilance.
Ce que raconte JD Cauhépé – lui-même au passé de guerrier – dans ses écrits sur son expérience d’Uke, laisse entrevoir le très haut niveau atteint par cet Adepte.

Maître Ueshiba le délèguera en Europe en 1962. Il s’établira en Belgique grâce au fondateur de la macrobiotique Sakurazawa Nyoiti (Georges Ohsawa).

Il est bien connu qu’il participa activement à la guerre en Mandchourie (1931-1945), mais ce qui l’est moins, c’est qu’il exerçait ses talents de sabreur comme…bourreau! Il aurait été responsable de plusieurs centaines de décapitation. D’une façon générale, les Japonais ont laissé un très mauvais souvenir en Chine.
C’est le paradoxe de ce Maître de guerre qui, parallèlement va évoluer dans une recherche spirituelle. Tous ces talents vont développer en lui une perception qui lui permettront une étrange prédiction:
« Quand je mourai, ma main sera séparée de mon corps! »

En 1964, après une démonstration à l’ambassade du Japon à Bruxelles, il est grièvement blessé dans un accident de voiture. Il est éjecté et sa main droite est tranchée. Il décèdera à l’hôpital le 24 mars à l’âge de 69 ans.

Cette vie brièvement résumée est source de réflexions sur la vie, la mort, le destin, les lois de causalité, d’interdépendance (karma) et les buts de la pratique d’un art martial tel l’Aïkido.

                                              JMT

Jeanne Lieberman ou la leçon de vie.

Jeanne Lieberman (1891-1987) fut dans les années 70 un « phénomène » médiatisé en raison d’un parcours singulier.
D’abord, elle débute le Yoga à l’âge de 40 ans ce qui pour l’époque était déjà peu ordinaire. Un mental peu commun la poussait à découvrir plus. Aussi à 58 ans, elle débute le Judo et reçoit le 1er Dan à 63 ans , puis l’Aïkido et le 1er Dan et enfin débute le Kung-fu à 75 ans pour obtenir le 1er Dan à 8O ans.
Elle enseigne ces disciplines à des élèves, en majorité des femmes, entre 40 et plus de 80 ans! Un reportage télévisé de l’époque la montre, enseignant dans son appartement du 9e arrondissement à Paris à des élèves âgées chutant …sur le parquet!

Il est des personnages qui vivent et démontrent un art de bien vieillir, où le temps n’a pas de prise car ils vivent dans la bonne humeur et la pensée positive dans l’instant présent. C’est une bonne leçon qui doit nous faire réfléchir les soirs de paresse, de douleurs ou de mauvais temps!

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Planète Aïkido

par Jacques Thomas-Lacroix

AF1A1320 - Version 2Je suis venu un jour au Dojo et depuis, j’y retourne toujours!
« Quand on cherche on ne trouve pas! » nous dit l’adage populaire.
Je ne cherchais rien… j’y ai trouvé une bande de joyeux compagnons pratiquant avec ferveur et un maître transmettant son art avec un brio et une passion chaque jour renouvelés.
Au Dojo, j’ai découvert un art source de connaissance des infinies possibilités de ce corps si familier et pourtant si méconnu.
Sur le Tatami, plus d’âge, plus de muscle, c’est la conduite du ki, l’énergie de vie qui mène la danse.
Ici, pas de compétition et pas de vainqueur.
Par l’interaction avec le partenaire, l’engagement martial ouvre des voies inimaginables pour le néophyte que j’étais.
Ce chemin est la route d’une vie, on n’a jamais fini d’apprendre!
Alors je retourne au Dojo!

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